Birmanie  (Myanmar)

25 février au 25 mars 2017

Trajet en noir

 

Nous continuons en France de parler de la Birmanie, alors que le nom officiel du pays est le Myanmar, depuis 1989. Superficie - 1,2 fois la France, pour 55 millions d'habitants. Peuple de religion bouddhiste à plus de 80 % - reconnue religion d'état, - ce qui explique la discrimination envers les musulmans, et dans une moindre mesure les catholiques.

 Une ancienne dictature militaire jusqu'en 2011, mais le pouvoir civile actuel reste plus ou moins sous tutelle des militaires. Aung San Suu Kyi, vainqueur des élections en 2015, tente une transition démocratique un peu difficile. Les "militaires" ont laissé le pouvoir au peuple en gardant une représentation égale à 25 % des députés, et, la constitution ne peut être modifiée qu'avec un vote supérieur à 75 %. 

 Gros problème envers la communauté Rohingya (1,5 million), de religion musulmane, accusée de tous les maux, et à qui l'ancienne dictature n’a jamais donné la nationalité birmane. Elle est victime de très forte répression, - une région un peu chaude, à la frontière du Bangladesh - à éviter pour les étrangers. J'étais tout près, à Mrauk U, où une manifestation anti Rohingya avait lieu avec près d'un millier de personnes dans la rue. Ici, ils les appellent les Bengalis, venus du Bangladesh du temps de l'occupation Anglaise. Il faut surtout éviter de prendre leur défense tellement l'animosité paraît forte.

 

Un peu de difficulté au départ à exprimer mon ressenti après mon séjour au Bangladesh. Une société à mi chemin entre la Chine et la Thaïlande. Une joie de vivre, mais pas le contact spontané que je vivais au Bangladesh. C'est l'inconvénient d'enfiler deux pays de suite. 

 Beaucoup de Français sur tous les lieux touristiques. Le Myanmar est le pays des Stupas, appelées pagodes. Difficile de prendre des photos de paysages sans voir apparaître ces monuments couleur or, en forme de cloche. De toutes les tailles et partout, - un peu comme nos calvaires dans l'ouest. Trop de touristes dans certains endroits, je ne vois plus la Birmanie, je vois une relation faussée comme sur tous les lieux touristiques.

 Les déplacements sont pénibles. Routes en mauvais état - pas vraiment de nids de poule, mais une surface cahoteuse, - toutes en virages et encombrées de véhicules très lents, du genre motoculteurs avec remorques. Des moyennes de 40 km à l'heure pour les bus. Les petits sacs plastiques distribués au départ donnent un indice sur l’état du futur trajet.

 Deux sociétés dans le même pays, - les villes et les campagnes. Ces dernières n'ont pas encore bénéficié des progrès techniques, - maisons en treillage de bambou avec couvertures en tôle ou en feuillage, chars à bœufs, récolte de la canne à sucre à la main, construction de route à la main en plaçant les pierres une à une, goudronnage à l'arrosoir (bidon percé). Une majorité de femmes pour ces travaux pénibles. Des campements rudimentaires sous bâches abritent les familles avec enfants qui travaillent sur les routes isolées. J'espère que les photos parlerons d'elles mêmes. 

 

Conduite à droite, mais la plupart des véhicules ont le volant à droite. Ce qui complique les dépassements. Pour une partie des bus les passagers descendent sur le milieu de la chaussée. 

 Attention dans l'interprétation des conventions en matière de circulation, - quand un véhicule lent fait signe au véhicule derrière que la voie est libre pour doubler, il met son clignotant gauche, - et inversement pour signaler que la voie n'est pas libre. 

 Mon itinéraire : 3 jours à Yangoon (Rangoon), deux heures de train pour rejoindre Bago un peu au nord, - bus vers Aungban (4 nuits), avec visite du lac Inle, ses canaux et villages sur pilotis, - un haut lieu touristique. Puis direction Lashio, Muset (frontière avec la Chine), et Namhkam. Pour apprendre que je ne pourrais pas rejoindre Bhamo - la route signalé sur ma carte n'est plus utilisée et les locaux utilisent un autre itinéraire passant sur le territoire chinois. Pas de visa, donc demi-tour.

 Muset, - une marée de camions, inondant l'environnement de poussière épaisse.  Région interdite aux étrangers, - je réussis à dormir quand même. J'apprends les interdits sur le tas, modifiant mes itinéraires en fonction. Les règles changent et les guides ne sont pas à jour. Dans certaines zones les guesthouses (petits hôtels) ne sont pas autorisées à recevoir les étrangers. 

 Retour sur Mandalais au centre, où j'apprends que le trajet que je prévoyais effectuer en bus pour rejoindre le nord n'est pas autorisé pour les étrangers, - il faut prendre l'avion. Petit flottement en raison des interdits, - je décide de louer une moto à un particulier pour une bonne semaine (deuxième fois), - pour avoir ma liberté de naviguer. Attention, vigilance, - aucune assurance. Mais la conduite est relativement cool et les conducteurs disciplinés. Avec mon mini sac à dos, - lessive tous les 2 jours, - mon périple à moto me fera parcourir plus de 1300 km en 9 jours - sur routes défoncées et pistes, - dur dur pour le popotin. J'en ai même attrapé des escarres (photos non disponibles). Et j'ai de la chance de ne pas être à la saison des pluies.

 Avec mon GPS, je peux évaluer les distances mais pas les temps de trajet, et, dès le deuxième jour je me rends compte que je n'atteindrais pas mon but fixé, - trop loin. Je cherche un endroit pour dormir. Avec la bénédiction de la propriétaire d'un "café-restaurant" ouvert à tout vent à un embranchement de routes, je m'apprête à passer la nuit sur un banc. J'attends la nuit et ne passe pas inaperçu dans ce lieu perdu. Un des clients a sa maison à 50 m et m'invite à dormir chez lui, - "merci Monsieur". Maison neuve en bois sur pilotis. Le dessous, tout ouvert, sert de cuisine, garage à moto, "salle de bain" (qui se résume à une réserve d'eau), etc. L'étage est composé d'une grande pièce vide et d'une chambre. Aucun meuble. L'électricité est fournie par une batterie. Pas de matelas pour dormir, - direct sur le parquet. Toilettes à 10 m de la maison.

 

Première pluie du voyage. Pas du tout intéressant en moto.

 Je m'aventure au nord de l'état de Chin, un peu isolé, à majorité chrétienne, - région vallonnée, classés comme la plus pauvre du pays. Magnifiques maisons en bois sur pilotis aux couleurs resplendissantes. Églises en bois qui dominent le village, - un petit côté "France", - dommage que ce n'est pas dimanche. Un peu difficile de trouver à me restaurer. Contrôle de police à deux reprises, mais sympa. Je ne suis pas en Iran !

 Retour sur Mandalais et direction vers le sud ouest, à Mrauk U, - 22 heures de bus. Je loue à nouveau une moto pour 3 jours. Ce n'est pas autorisé me dit-on, mais il ne faut pas demander dans ce pays. A chaque fois je discute sur la rue avec des personnes qui m’interpellent et, quand je sens que le courant passe, je glisse dans la conversation que je cherche à louer une moto. Je décide moi-même du tarif, - 7 euros par jour, - sachant qu’une moto neuve coute entre 500 et 700 €. C’est une bonne affaire pour le particulier.

 Je remonte vers les villages musulmans au nord - interdits pour les étrangers. Les motos ne sont pas arrêtées aux check points, - il faut passer vite. Regards hostiles de la population, on me regarde passer avec un visage fermé. Pas de restaurants ou endroits pour boire un thé ou un café, ce qui m’aurait donné une occasion naturelle de m’arrêter et tenter de discuter.

 Le lendemain je me laisse tenter par une visite guidée dans des villages aux femmes à visages tatoués (Chin villages, à 3 heures de bateau). Ce genre de visite n’est pas ma tasse de thé, mais ici la pratique s’est arrêtée autour des années 1960, ce qui fait qu’il ne reste plus que quelques femmes âgées dans chaque village, et, très fières de montrer aux étrangers la coutume de leur époque.

 

Alors que le Bangladesh était « vierge » dans ma tête, tout ce que j’entendais ou lisais sur le Myanmar me conditionnait avant mon départ. Et le fait d’avoir déjà parcouru tous les pays qui l’entourent m’a sans doute freiné pour avoir cette petite étincelle de découverte qui me porte dans mes périples. Attention, ce ressenti est très personnel, avec mon propre vécu, et n’est pas du tout partagé par la plupart des touristes qui arpentent le pays.