Algérie - Sahara - Niger

Décembre 1989 - janvier 1990

Itinéraire en pointillés rouge (cliquer pour agrandir)
Itinéraire en pointillés rouge (cliquer pour agrandir)

(Suite du Maroc)

Le voyage en train de Rabat à Alger aura duré 24 h - c'est long surtout quand on n'arrive pas à dormir. A la douane, je fais la rencontre de 4 autres touristes voyageant dans les mêmes conditions que moi, 3 Hollandais et 1 Danois. Nous finissons le voyage ensemble et logerons dans le même hôtel pendant 3 nuits à Alger.

En descendant du train, il fait nuit – c'est une situation jamais bien confortable. Nous nous adressons à un commissariat de police près de la gare qui nous indique un hôtel pas trop loin. OK - nous prenons un taxi pour plus de sécurité. Je suis le seul à parler français mais je laisse les hollandais discuter avec le chauffeur. Nous remarquons très vite qu'il fait un immense détour pour nous conduire à notre hôtel, mais il nous conduit quand même à la bonne adresse, en nous réclamant bien sûr une somme en rapport avec la distance parcourue et non la distance entre le commissariat et l'hôtel. Là, je luis fais remarquer en français qu'il est en train de nous arnaquer et que l'on peut retourner au commissariat pour demander la distance. Le pauvre homme - il en tremble dans sa culotte, ….au point qu'il ne veut plus d'argent et veut nous faire cadeau du trajet. Je lui donne quand même une petite somme pour le dédommager. Je crois qu'il a eu la trouille de sa vie - il pouvait perdre son job.

Un ou deux jours après, le couple de hollandais et moi devons nous rendre à l'ambassade du Niger. Nous demandons un taxi, le chauffeur est hésitant,….manifestement, il ne sait pas où se trouve cette ambassade. Il nous affirme pourtant que si et nous voilà partis. Nous tournons pendant plus d'une heure dans Alger en repassant 2 fois par le point de départ. Bien sûr on lui dit qu'on ne paiera pas toutes ces recherches et par 2 fois il remet son compteur à zéro. Pour finir, c'est nous qui trouvons l'ambassade par la couleur du drapeau. Je pourrais en écrire des pages sur ces taxis.

 

Le change de monnaie : La monnaie est le dinar. Les autorités algériennes obligent les touristes à acheter pour 1000 dinars au change officiel, quelle que soit la durée du séjour, c'est-à-dire au taux de 1 dinar pour 0,75 franc. A côté de cela, il y a le marché noir – interdit, mais tout le monde le pratique – où le change est d'environ 5 dinars pour 1 franc à Alger et 3,5 à 4 dinars pour 1 franc dans le sud du pays. Je dois anticiper et partir dans le sud avec pas mal d'argent sur moi car les banques doivent se faire rare dans le Sahara ! Je sens que je vais être un peu juste en monnaie. Je pensais pouvoir retirer des francs dans les banques mais les banquiers m'ont bien ri au nez quand j'ai voulu retirer avec ma carte de crédit. L'Algérie n'est pas ouverte aux touristes comme le Maroc.

Vu cette somme qui est imposée la vie est plus chère qu'au Maroc. Par la suite, pour ceux qui restent longtemps le coût de la vie baisse fortement avec le change au noir, mais …. je ne fais que passer.

Quelques prix : 1 kg d'orange = 20 dinars, 1 baguette = 1 dinar, un repas au restaurant = 25-30 D à Alger et 70-80 D à Tamanrasset (la porte du désert), l'hôtel (premier prix) = 50 D à Alger et 100 D à Tamanrasset, camping = 25 à 40 D, 1 café = 3 D.

 

Je ne suis resté que 2 jours à Alger et j'ai obtenu mon visa pour le Tchad en 2 heures (coût : 105 D). Le voyage Alger-Tamanrasset, 2000 km me prendra 5 jours.

-         Alger-Gardaïa, 600 km en bus : 1 jour

-         Gardaïa- El Goléa, 250 km par grand taxi : 1 jour

-         El Goléa-In Sala, 400 km en stop : 1 jour

-         In Sala-Tamanrasset, 650 km en stop : 2 jours

Entre El Goléa et In Sala, aucun bus ou taxi ne circule, la piste est trop mauvaise. Seuls les camions et les voitures de touristes qui osent passent. Ensuite entre In Sala et Tamanrasset, il y a 2/3 de route correcte et 1/3 de piste avec de gros cailloux et des passages de sable mou où les voitures s'ensablent de temps en temps. Les paysages sont magnifiques et très changeants.

A In Sala, j'essaie de trouver un chauffeur routier de la région pour faire les 650 derniers km. Je propose la même somme que les camions bus, 130 D. Deux acceptent de me prendre mais pour 400 et 500 D. Je préfère refuser car ils prennent des touristes uniquement pour l'argent et cela ne m'intéresse pas. Après 3 heures d'attente et d'essais je décide de reprendre la voiture avec les touristes de la veille.

Arrivé à Tamanrasset, c'est l'invasion d'étrangers - plus de 4000 touristes arrivent ici par avion pour passer Noël et la St Sylvestre. Sur la route, nous avons également rencontré plein de fanas de la traversée du Sahara. A cette saison, il passe plus de 50 voitures par jour dont 90 % de 504 essence qui seront vendues principalement au Niger. Tous ces aventuriers rentrent ensuite en avion en Europe. Dans la plupart des cas, la vente de la voiture leur permet de voyager gratuitement, mais on nous dit qu'il y en a de plus en plus et que les prix des voitures ont tendance à baisser.

La préparation des voitures pour passer le Sahara :

-         Installer une plaque de 5 mm d'épaisseur pour la protection du carter contre les rochers (indispensable)

-         Installer un système de blocage pour le thermostat du ventilateur pour qu'il fonctionne en permanence

-         Idem pour la pompe à eau

-         Installer un filtre à air à bain d'huile pour le sable

-         Prévoir 2 ou 3 roues de secours supplémentaires - 2 plaques de désensablage - du scotch pour protéger les phares, les serrures, le coffre - des pelles, courroies, caisse à outils (++), un câble de remorquage, du "saintofer" (mastic à froid) pour les crevaisons de radiateur ou réservoir, etc.

Il est préférable d'avoir de bonnes notions de mécanique concernant le type de voiture que l'on emmène.

Pour que le passage en Algérie ne coûte pas trop on peut également emmener des roues de secours en plus de ce qui est nécessaire (non déclarées à la douane d'entrée). Une roue se vend 900 à 1000 D, même avec un pneu à moitié usagé. Emmener également des devises (francs) non déclarées à la douane.

 

Arrivé à Tamanrasset, je me renseigne sur les possibilités de traverser ce fameux désert. Il y a 3 solutions ; Une voiture de touriste, c'est gratuit ou presque, on tient compagnie et on aide à désensabler. Mais je suis venu ici pour découvrir le pays et en même temps la vie locale, donc ce sera en dernière solution ; Traverser comme le font les locaux, au dessus des camions de marchandise ; Ou encore, et c'est mon rêve, avec une caravane de dromadaires (que l'on appelle chameaux par erreur). Les caravanes de dromadaires existent bien ici mais pour les ballades de touristes - c'est beaucoup plus rentable pour les bédouins que les transports, qui ont été remplacés par les gros camions.

A la police des frontières où je demandais comment trouver ce genre de caravane, je me suis vu rire au nez. J'ai dû insister pour qu'ils me prennent au sérieux et ils ont fini par reconnaître qu'il y avait une possibilité, c'était de prendre un camion jusqu'à In Guézam à 400 km, et de là, prendre une caravane de Nigériens qui eux, font encore le transport de marchandises avec ces dromadaires. Cela me laisse un espoir, mais qu'est ce qu'il faut insister. Les touristes sont pris pour des rêveurs et,….. j'en suis un !

Au camping je rencontre 5 autres Français avec 3 voitures. Ils s'apprêtent à partir faire une ballade de 3 jours dans le Hoggar – montagnes autour de Tamanrasset – en passant par Assekrem, le lieu célèbre où vécut le Père De Foucault en 1915-1916. Je me joins à leur groupe. Ça nous fait 2 personnes par voiture. C'est un lieu de pèlerinage pour beaucoup de catholiques. On peut s'y rendre en 4x4 ou à dos de dromadaire. Les montagnes sont magnifiques mais pas très carrossables - c'est limite pour passer avec les 504. Il faut descendre pour pousser les voitures, ranger les cailloux, etc. On perce un réservoir d'essence et casse un tuyau d'échappement, mais c'est l'aventure et les voitures n'ont pas une grande valeur.

Le premier soir, nous rencontrons un groupe de 140 personnes en pèlerinage – ils avaient perdu l'un des leurs dans la journée. Le gars était égaré dans la montagne en short et Tshirt. Cela nous semblait très difficile de passer la nuit avec le vent et le froid - la seule solution est de marcher toute la nuit sans s'arrêter. Ils ont fait un grand feu avec des pneus sur une hauteur pour lui indiquer la direction. Le matin, il n'était toujours pas retrouvé et il leur fallait au moins 3 heures en 4x4 pour donner l'alerte à Tamanrasset. Mon groupe leur a prêté 2 paires de jumelles pour les aider dans leur recherche. Finalement nous avons appris plus tard qu'il était sain et sauf. Il avait rencontré des bédouins le soir avec des dromadaires, avait été habillé par eux et avait dormi sous leur tente. C'était vraiment l'affolement et les recherches ne peuvent s'effectuer qu'accompagné d'un guide, sinon, c'est 10 personnes qu'il faut rechercher.

Notre ballade a duré 3 jours avec un campement dans la montagne à 2000 m d'altitude et de la glace le matin au réveil – 3 jours sans se laver, avec un nuage de poussière en permanence derrière chaque voiture. La douche même glacée au retour au camping a été la bienvenue.

 

Rencontre avec un policier des frontières à Tamanrasset : Son travail est de traquer les trafiquants du désert. Le Sahara est un lieu de trafic en tous genres et la surveillance y est très difficile. Les trafiquants roulent la nuit tous phares éteints en voiture, à plus de 100 km/h. Ce sont des gens qui sont nés dans le désert, qui connaissent tous les rochers, toutes les dunes comme le fond de leurs poches. Les douaniers eux, sont équipés de 4x4 tout terrain, beaucoup moins rapide que les voitures et surtout ils sont moins à l'aise pour conduire vite la nuit. Il existe également de la contrebande avec les dromadaires qui passent là où les voitures ne peuvent passer.

 

Les femmes musulmanes sont en général voilées, avec un voile différent d'une région à une autre. Au nord, elles ont un petit triangle en dentelle sur le visage, la pointe vers le menton et le haut sur le nez. Au sud, région d'El Goléa et In Sala, elles n'ont d'apparent qu'un seul œil, tout le reste est caché. C'est vraiment typique à voir. L'ouverture autour de l'œil forme un triangle de 5 cm de côté environ. Je n'ai malheureusement pas pris de photo croyant qu'il y en aurait dans le sud. Ici, à Tamanrasset c'est déjà le Sahara et les femmes ne sont presque pas voilées.

 

Le droit des femmes expliqué par un homme : "Ma femme ne peut pas aller voirses parents sans mon autorisation, elle ne peut pas parler au téléphone. L'homme ici a tous les droits sur sa femme. Les familles qui vivent en France ont tendance à prendre les habitudes françaises et l'homme aide plus sa femme. Mais quand ils reviennent en Algérie, l'homme reprend les habitudes locales, sinon il se fait rejeter par la société des hommes".

 

L'Algérie correspond à 4 à 5 fois la superficie de la France, mais seul le nord du pays se développe. Les autorités essaient de boiser le désert depuis environ 10 ans mais cela coûte très cher et beaucoup d'arbres meurent malgré un plan d'arrosage.

Le pays importe plus de 50 % de ses besoins en céréale et a un énorme problème de logement. Les constructions sont entièrement contrôlées par l'état et la population augmente plus vite que le nombre de nouveaux logements. Il est courant de voir 3 générations pour 2 pièces de vie. Dans le train, un homme m'expliquait que chez lui il n'y avait que 2 pièces, son frère marié couchait dans une et lui couchait dans l'autre avec ses parents, ses frères et sœurs et les 2 enfants de son frère. La personne qui veut construire elle-même sa maison peut le faire mais elle doit tout acheter au noir et payer les matériaux 3 ou 4 fois plus chers. Dans le sud, où beaucoup d'habitations sont en terre, le problème est moins important.

Depuis 4 ou 5 ans les gens reconnaissent qu'il y a un léger changement. Avant, tout était centralisé, un peu comme en URSS. La pérestroïka devrait faire son effet assez vite ici aussi, tout le monde l'espère.

Le réseau ferroviaire n'a pratiquement pas évolué depuis le départ des Français, si bien que l'on peut voyager dans de très beaux wagons mais on n'avance pas – 60 à 80 km à l'heure. Pour caricaturer, c'est un TGV sur des rails de 1950.

Le téléphone à Tamanrasset : un seul téléphone à la poste et il faut passer par une opératrice à Alger. Résultat - 3 heures d'attente, voire plus, et un fonctionnaire, qui, quand il est fatigué dit que le téléphone de fonctionne pas – de quoi décourager ceux qui attendent.

Le Sahara

 

Le 1er janvier 1990

Ma St Sylvestre était un peu triste hier. Je l'ai passée seul au camping avec au menu le contenu d'une boite de sardines dans un petit pain ouvert en deux. Dans ce cas on se couche tôt et pense à l'aventure que l'on pourra vivre le lendemain.

Je quitte Tamanrasset ce lundi où j'ai pu trouver un camion pour la traversée. Le chauffeur me demandait 300 D mais je n'en paierai que 200 car je veux m'arrêter à In Guézam à 400 km, juste à la frontière entre l'Algérie et le Niger, en plein milieu du Sahara.

Le semi remorque est en surcharge d'au moins 7 à 8 tonnes avec des pneus en très mauvais état, sans lumière arrière, sans freins sur la remorque, etc. …. c'est normal et sans doute superflu ! Ils sont 4 dans la cabine et nous sommes 8 passagers sur le chargement de sel - que des hommes. Nous sommes en hauteur et aux premières loges pour voir le paysage, et aussi pour recevoir le soleil sur le crâne. Le chèche ici est indispensable – 3 m de tissu enroulé autour de la tête – il protège contre tout, le soleil, le froid de la nuit, de la poussière que l'on respire, etc. On se camoufle le visage avec et on ne laisse apparaitre que les 2 yeux ….. de vraies femmes voilées !

Au bout de 60 km nous éclatons un pneu – pas de panique, je me dis que c'est sans doute quelque chose de normal – de toute façon nous avons 2 roues de secours. Les "assistants-chauffeurs" cherchent de grosses pierres et commencent à les caler sous l'essieu. Je devine dans un deuxième temps qu'ils n'ont pas de cric – une situation tout à fait normale, le cric n'est pas une pièce essentielle pour qu'un véhicule roule. Dans ce cas, au lieu de lever le camion on cale sous l'essieu pour qu'il ne descende plus et on creuse sous l'emplacement de la roue pour la changer – pas bête, il faut y penser. Ils n'ont rien pour creuser, seulement une pelle ronde et un démonte-pneu. Finalement, ils abandonnent et attendent le passage d'un autre camion. Au bout d'une demi-heure, un camion "français" se pointe à l'horizon et le chauffeur me demande de tenter d'arrêter le véhicule. Ils savent qu'ils n'ont aucune chance que le chauffeur s'arrête si c'est eux qui lui font signe. Le camion stoppe - il a un cric bien sûr - mais aussi une réaction en voyant le tableau, "oh la la, on en a bien pour 2 heures", et il décide de repartir. Quelques temps plus tard, un autre camion se pointe, il est algérien, nous changeons la roue et nous voilà repartis.

Pas pour très longtemps – au bout de 30 km environ, crevaison de la même roue. On démonte – 2 ou 3 trous dans la chambre à air et rien pour réparer, pas de colle ni de rustine. On a bien une autre roue de secours mais elle est pour le tracteur et de dimension différente. Alors cette fois-ci, on attend qu'un camion passe dans l'autre sens pour emmener le chauffeur rechercher deux roues et des chambres à air. Au bout de 2 heures d'attente, il réussit à partir avec un camion. Il ne reviendra que le lendemain vers 3 h de l'après midi. Nous avons donc campé 24 heures sur place en plein désert. Je me dis que ce trajet commence bien ! Personne ne s'inquiète, on attend, allongés en plein soleil ou à l'ombre du camion – cela semble la routine pour tout le monde. Parmi les passagers nous sommes une moitié de nigériens et une moitié de maliens environ, plus un français, moi. Une fois réparé nous avons roulé une partie de la nuit. Aucun touriste ne peut se permettre de rouler la nuit, c'est beaucoup trop dangereux pour nous. Par la suite nous avons éclaté un autre pneu et crevé une seconde fois. Ils avaient juste assez pour réparer.

Arrivé à In Guézam le mercredi après midi. Le chauffeur rencontre un collègue avec un autre camion, sans doute de la même "entreprise". Ils décident de changer le train de pneus arrière de la remorque et font un échange. Nous repartons avec une remorque équipée de 8 roues au lieu de 4 précédemment.

Pendant ce trajet, nous nous sommes ensablés une dizaine de fois. A chaque fois, on pellette le sable devant les roues et on place les plaques de désensablage devant les roues motrices en les enfonçant un peu sous les roues, et on redémarre. Si le banc de sable mou est trop long, il arrive que le camion s'ensable à nouveau 10 m plus loin. Sur un passage, nous avons dû pelleter 7 ou 8 fois de suite pour en sortir. C'est exactement la même technique pour les voitures mais avec plus de risque de casse. En voiture, quand il y a un passage mou, on le voit souvent un peu à l'avance, il faut s'élancer pour passer en force. Or, il arrive qu'il y ait des cailloux ou rochers cachés dans le sable et là le risque de casse est important. Près de la moitié des voitures arrive avec un pot d'échappement cassé. Des carcasses de voiture sillonnent le parcours, surtout dans un passage nommé "Laoni". C'est plutôt inquiétant la première fois.

A cette saison, plus de 50 voitures traversent chaque jour par cette piste. En période d'été, il n'y a quasiment personne, il fait trop chaud.

 

Je ne savais pas que nous serions nourris sur le parcours et j'avais emmené pour environ 2 jours de nourriture. Le chauffeur emmène 3 aides qui sont chargés de tout faire y compris la cuisine. J'ai mangé comme toute la compagnie, un menu peu varié – pain de sable, viande (avec les mouches en prime) et pommes de terre.

Avant de faire le feu, ils creusent le sable pour donner une forme de cuvette. Ensuite on fait le feu et on met la viande à cuire dans l'eau avec les pommes de terre coupées et quelques oignons. Pendant ce temps, une autre personne pétrit la pâte à pain et on déplace le feu en gardant la "cuvette de sable". La pâte à pain est étalée au fond de cette cuvette que l'on recouvre de sable chaud et de quelques braises. La cuisson dure environ 1 h. Le pain est sorti ensuite et gratté avec un couteau pour retirer les grains de sable incrustés. Il est cassé en petites bouchées et placé dans un plat sur lequel on y verse le bouillon de cuisson avec les pommes de terre et oignons, mais sans la viande.

Pour manger, 2 plats avec 6 personnes autour de chaque, et, …. 3 cuillères pour l'ensemble. On se sert en prenant la cuillère et on passe à son voisin, ainsi la cuillère passe de bouche en bouche …… ce n'est pas pire que chez nous lorsqu'on boit "à la tournée" avec le même verre pour tous. Sur la fin, une personne sépare la viande en bouchées avec les mains et dispose celles-ci autour du plat. C'est un repas assez bon mais un peu trop pimenté à mon goût.

En ce qui concerne la boisson, chacun boit à même le "pichet", un bidon en plastique ou autre récipient, en général très sale de l'extérieur. Pour ma part j'ai toujours bu de l'eau de ma gourde avec un cachet de désinfection. Chaque camion est équipé d'une réserve de 100 à 200 l d'eau, de couleur plutôt jaunâtre due à la poussière du désert. J'ai bu également de cette eau après un séjour d'une heure dans ma gourde. Il faillait boire doucement pour laisser le sable déposé au fond de la gourde. Idem pour manger, éviter de mâcher en faisant toucher les dents en raison des grains de sable dans la nourriture.

Pour chaque repas, il fallait prévoir un arrêt de minimum 2 heures.

Le petit déjeuner était plutôt léger, dattes et thé avec un peu de pain que chacun avait emmené. Quelquefois, ils nous préparent du lait (en poudre). J'en ai bu une fois parce qu'ils l'avaient fait chauffer, mais la plupart du temps ils le buvaient froid. Le thé est bu à chaque repas.

 

La prière dans le Sahara : la plupart de mes collègues de voyage étaient musulmans et disaient la prière 4 ou 5 fois par jour, toujours tournés vers la Mecque. Ils étendent un tapis, une veste, une couverture sur le sable, se déchaussent et miment le lavage des mains, bras, visage, pieds. Ils font exactement les mêmes gestes que s'ils avaient de l'eau. C'est curieux à voir. Ensuite, une fois propre (dans leur esprit) ils disent leur prière.

 

J'ai été très bien accepté dans le groupe dès le départ. Je sentais des sourires un peu le premier jour, se demandant comment j'allais me comporter pendant le voyage, mais quand ils ont vus que j'acceptais de vivre comme eux j'étais presque devenu l'un des leurs. Je dormais le long du camion, comme eux, à la belle étoile, avec environ 5° la nuit. C'est quand même froid quand il y a du vent. On s'habille bien et on se roule dans des couvertures – le sac de couchage pour moi.

 

Prise de photos : j'étais bien sûr le seul de ce groupe avec un appareil photo. Au début je leur demandais l'autorisation de prendre des photos – certains étaient réticents et j'évitais. A la fin ce sont ces mêmes personnes qui me prenaient en photo avec tout le monde.

 

Il vaut mieux éviter de dire que l'on a une fille de 18 ans et montrer les photos de famille, tout le monde veut que je leur "donne" ma fille en mariage. J'avais beau leur expliquer qu'en France les coutumes étaient différentes et qu'on ne marie pas sa fille de cette manière, ils n'avaient pas l'air d'admettre facilement.

Le chauffeur, qui est dans ce cas le chef suprême de l'expédition, a 3 femmes, une en Algérie, une au Niger et une au Mali. Comme chez nous, les marins dans les ports, sauf qu'ici ce sont des femmes officielles. Il me dit que je peux continuer le voyage avec lui et il me donnera une femme. "Tu couches avec la femme, comme ça, t'as pas froid, tu fais 2 ou 3 fois le soir et une fois le matin, et comme ça la femme elle est contente et t'as bien couché" (texto). Il voulait aussi que je lui trouve une femme en France et une blanche. Dans leur religion les hommes peuvent se marier avec 4 femmes.

 

A In Guézam où je devais m'arrêter, je m'aperçois que mon visa a expiré depuis deux jours, et, pour éviter d'avoir des ennuis avec les autorités je décide de ne pas attendre pour passer la frontière côté Algérie. Lorsque j'ai demandé mon visa à Londres on m'avait demandé combien de temps je pensais rester en Algérie, et à ce moment là, je pensais que deux semaines seraient largement suffisantes pour traverser le pays. C'était sans compter la lenteur des déplacements et les différentes rencontres. A l'avenir, je me promets de demander le maximum autorisé pour éviter cette situation.

Enfin, au passage de la frontière, aucun problème, je ne suis même pas sûr que le douanier ait vu que j'avais dépassé la durée de mon visa, sinon il y a de forte chance qu'il aurait essayé de me soutirer quelques bakchichs.

Les deux frontières, algérienne (In Guézam) et nigérienne (Assamaka), sont distantes d'environ 30 km et les démarches sont si longues qu'il faut compter une journée pour passer ces deux postes.

Le chauffeur du camion me demande si je peux aider le groupe pour remplir les papiers de douane pour les voyageurs de la benne. Je le fais avec plaisir et cela me permet de voir les passeports – aucune date de naissance précise, c'est écrit par exemple "vers 1954". C'est quelquefois la même chose pour le lieu de naissance. Par contre qu'ils soient Maliens ou Nigériens, ils résident tous en Algérie, à Tamanrasset. Cela leur donne une plus grande facilité pour voyager. Aucune adresse n'est précise, c'est comme si mon adresse était "Laval".

 

Les douaniers nigériens essaient de racketter plus ou moins les touristes en leur trouvant des choses pas en règle ou en faisant un peu de chantage. C'est d'autant plus facile que ces règles, si elles existent, ne sont jamais écrites. Exemple : "tu nous laisses une roue et on te laisse partir". Les routiniers de ce voyage ont toujours quelque chose dans leur musette pour passer plus vite. Il est vrai aussi que dans tout ce trafic de voitures qui sont vendues au Niger, une partie d'entre elles sont des voitures volées. Ça, les douaniers le savent et ferment souvent les yeux. A la frontière algérienne, il y avait une land rover italienne bloquée depuis une journée pour des numéros de moteur et châssis différents de la carte grise. Eh bien, cette land rover nous a doublé après sur la piste, elle était donc passée quand même.

A Assamaka, frontière côté Niger, il y a seulement une quinzaine de maisons et un restaurant, où tous les touristes passent pour se désaltérer. Ici, les gens paieraient une fortune pour avoir cette bière fraîche après cette traversée de 400 km, où ils ont surtout mangé beaucoup de poussière.

La première ville est encore à 200 km, Arlitz, mais la piste est très plate, sans encombre, et il faut environ 3 heures pour l'atteindre avec une bonne voiture.

Au final, je décide de rester une journée à Assamaka, au milieu du désert. J'en profite pour mettre à jour mes écrits, ces 3 jours et demi de traversée. Je décide aussi d'abandonner l'idée de trouver une caravane de dromadaires. Je pourrais sans doute la trouver mais cela risque d'être long et ennuyeux, et après ce que je viens de vivre, je trouve que c'est déjà pas mal.

 

Anecdote : j'ai fait le trajet de Tamanrasset jusqu'ici, Assamaka, frontière côté Niger, dans ce camion chargé de sel. Je me rends au poste de douane pour l'entrée au Niger et le douanier me demande mon numéro de véhicule. Ben, le problème est que je n'en ai pas - je n'ai ni l'ancien (camion) ni le prochain car je ne sais pas encore comment je repartirais. Ça lui pose apparemment un problème et il refuse de me redonner mon passeport ! Et si j'avais décidé de prendre une caravane de dromadaires ? Je ne suis définitivement pas dans la norme. Je repars avec le sourire en lui laissant mon passeport, sachant qu'il n'y a pas le feu puisque je reste ici au moins une nuit.

Le soir, je pars faire une marche sur les dunes à 5 km environ - magnifiques dunes qui se déplacent au gré des vents et des saisons. En revenant je vois venir ce même douanier vers moi, un peu affolé. Il devait me chercher dans le village depuis déjà un moment et mon passeport devait lui brûler les mains. Il me remet mon document et me souhaite un bon voyage. Bizarre, il n'est plus question de numéro de véhicule !

 

Traversée avec une caravane de dromadaires :

Pour info et pour ceux qui veulent tenter l'expérience, cette traversée est possible. Rencontre avec un bédouin et ses 4 chameaux qui fait une traversée en 8 jours, seul, pour emmener des troupeaux d'un village à un autre. Le problème est qu'il ne parle presque pas le Français. Je l'ai rencontré sur la piste. Il est né dans le désert et le connait comme un agriculteur connait ses champs. Il m'a offert le thé et des dattes à manger,…….. avec les petits vers en prime – mais cela ne m'a jamais posé de problème. L'eau qui a servit à préparer le thé est transportée dans une peau de mouton ou de chèvre. La plupart utilise ce moyen de transport pour l'eau. Il vaut mieux éviter de regarder ce qui sort, mais là pour le thé elle bout, donc pas d'inquiétude.

 

L'itinéraire Tamanrasset-In Guézam (400 km) est plus ou moins balisé, mais malgré cela, des touristes s'égarent car la piste ne suit pas toujours le balisage et il en existe souvent plusieurs. Il faut toujours repérer de quel côté du balisage on se trouve. Les habitués empruntent souvent des pistes parallèles qui sont quelquefois très éloignées de la piste principale. C'est tentant de suivre ces pistes mais très dangereux. Certains se sont retrouvés ainsi très loin de l'itinéraire principal et ont dû revenir en arrière en espérant retrouver leurs traces. Deux français avaient parcouru ainsi 200 km supplémentaires sur un parcours de 400 et étaient bloqués à In Guézam par manque de carburant.

Les avaries mécaniques sont aussi très fréquentes et il faut souvent réparer avec les moyens du bord.

Un belge a laissé sa voiture dans le désert à la suite d'une casse.

Un allemand est resté 8 jours sur place à attendre qu'on le dépanne par un remorquage jusqu'à la frontière. Il ne manquait de rien, tout le monde le "bombardait" d'eau et de nourriture – il pouvait nourrir 5 personnes avec lui. En général les touristes s'entraident quand il y a problème et les pièces de rechange s'échangent. La solidarité du désert garde toute sa réputation.

Le problème est quand une voiture ne peut être dépannée sur place et qu'il faut la remorquer ou la transporter par camion. C'est souvent le coup de masse de la part des Algériens, et il faut être très patient pour négocier.

 

Chargement d'une voiture dans un camion : Ils creusent un trou et y reculent le train arrière du camion. Ensuite, avec le sable dégagé, ils aménagent une butte à l'arrière qui ainsi forme un tremplin qui permet de monter la voiture dans la benne. Comme pour les Français, qui n'ont pas de pétrole mais des idées.

 

J'ai toujours les mêmes problèmes d'argent. Je n'ai pas emmené suffisamment de franc français avec moi et je me vois dans l'obligation de laisser 20 à 25 % de commission pour changer des dollars – c'est l'arnaque. Je referais le plein à la capital, Niamey, où cela doit être possible.

 

Niger

 

 

Assamaka – Arlitz : 200 km environ. Je suis pris en stop par deux français qui emmènent chacun une voiture. La piste est belle et ne pose pas de problème – seulement un ensablage. Elle est toutefois moins bien balisée qu'entre Tamanrasset et In Guézam. Je perçois pour la première fois ce qu'on appelle un mirage dans le désert – une sorte de brume au loin qui dessine un village et des arbres. Plus on se rapproche et plus l'image s'éloigne et se dissipe pour laisser place au désert tout simplement.

Arrivé à Arlitz, première ville du Niger, nous sommes envahis par une foule d'acheteurs de véhicules, tous intéressés par les meilleures affaires. Les français avaient à vendre une 504 diesel familiale et une 404 avec plateau (pick up) avec un moteur complet et une douzaine de pneus. Heureusement que les nigériens ne sont pas trop voleurs - c'était comme un essaim d'abeilles autour du pick up. Les hommes prennent une pièce dans la main et tendent une liasse de billets si bien que le propriétaire ne sait plus où donner de la tête. Les sommes proposées sont souvent dérisoires et le vendeur français doit se mettre dans la peau d'un africain, c'est-à-dire que s'il veut vendre une pièce à 50 francs il doit annoncer un prix à 100 francs. Tout est comme cela et ils connaissent beaucoup mieux les prix de vente que nous.

Ici, c'est la première place de vente sortie du désert et les nigériens cherchent à faire des affaires en achetant le moins cher possible pour revendre 2 ou 300 km plus au sud le double ou le triple.

Après avoir vendu les 2/3 des pièces détachées, nous sommes allés au camping, suivis de 3 acheteurs possibles pour les voitures. Dans la nuit, nous nous installons pour dormir à la belle étoile près des voitures et nous sommes envahis de moustiques. Je me relève pour prendre ma lotion dans la 404. Je ne devais pas avoir les yeux bien ouverts car je casse la clé dans la serrure, et, bien sûr, il n'y a qu'un seul exemplaire. Le lendemain, après avoir récupéré les deux morceaux de la clé, je me mets en quête d'un soudeur pour la réparation. Je trouve une personne qui peut s'en charger mais il refuse que je le suive. En général ici, on fait confiance à leur débrouillardise. Résultat ça me coûte 40 francs, une fortune comparée au travail réalisé, mais je n'ai pas le choix, je dois réparer ma gaffe. Retour au camping on s'aperçoit qu'ils ont ressoudé les deux morceaux à l'envers et il m'a fallu limer minutieusement pendant 2 heures pour rattraper l'erreur.

Le lendemain vers midi, les français réussissent à vendre la 504 familiale à 13 500 francs français.

 

Une règle importante, quand on a vendu une voiture au Niger, ou n'importe où en Afrique, il faut partir de la place le plus vite possible. Deux raisons :

-                    les voitures sont vieilles en général, 10 à 20 ans, et ont souffert pendant la traversée du Sahara. L'acheteur peut revenir pour réclamer des vices cachés.

-                    Le vendeur possède une somme d'argent en liquide relativement importante sur lui et certains se sont fait voler la nuit suivante dans leur tente.

 

L'animal écologique : A Arlitz il n'existe aucune verdure et pourtant on y trouve des chèvres en quantité. C'est l'animal dépollueur du désert, il se nourrit de tout ce qu'il trouve laissé par l'homme. On peut même se demander s'il ne digèrerait pas les matières plastiques.

 

Arlitz – Agades : A notre arrivée à Agades, nous nous arrêtons au barrage de police, comme dans tous les gros villages. Les policiers commencent à s'agglutiner autour de la 404 pour l'acheter. Les propriétaires ne voulant pas la vendre le soir même demandent un tarif plus élevé pour repartir au plus vite. Mais les policiers font une proposition plutôt alléchante et les deux français commencent à se regarder. Au moment où les français s'apprêtent à discuter, les policiers se retirent discrètement et font semblant de ne plus être intéressés. Nous avons appris par la suite que l'on ne peut faire confiance à leur proposition que lorsqu'ils montrent l'argent – argent qu'il faut compter avec minutie, car il arrive que dans les liasses les billets soient pliés en deux et ainsi le même billet est compté deux fois.

 

Nous atteignons le soir même le camping d'Agades où le Paris-Dakar séjourne pour la nuit. Le camping est occupé par les concurrents et même s'il reste encore de la place le tarif est prohibitif pour ce soir. Nous entrons à pied pour voir les concurrents du PD. L'activité y est intense et les mécaniciens travaillent une partie de la nuit. Certains pilotes de moto apprennent leur itinéraire du lendemain sur leur road book. Je suppose qu'ils reçoivent leur itinéraire le soir pour le lendemain, sinon certains seraient tenté d'aller reconnaitre le parcours. Pour les motos, ce road book est placé sur un rouleau que le pilote fait dérouler au fur et à mesure qu'il progresse. Dans les voitures, c'est le copilote qui se charge d'étudier l'itinéraire.

On ne voit pas les grandes écuries comme Peugeot et Honda. Elles sont dans des endroits secrets et surtout bien gardées.

Nous ressortons d'Agades pour dormir dans la nature où nous avons entendu des moteurs ronfler toute la nuit. Quand le mécanicien change le moteur le soir il arrive qu'il roule une partie de la nuit dans les dunes environnantes pour le roder avant le départ du lendemain.

 

Trajet Agades – Tahoua : Les amis français ayant vendu leur 404 à Agades nous décidons de nous séparer ici. La veille au soir, je fais la rencontre de tout un groupe de tunisiens, 10 voitures et 14 personnes. Ils doivent se rendre à Tahoua le lendemain et sont d'accord pour me faire profiter du voyage. Mais avant ils doivent vendre une de leur voiture car ils sont fauchés et ne peuvent plus payer l'essence. Dans l'incertitude de leur départ, je pars faire du stop, et au cas où je ne serais pas parti, ils me prendraient au passage. Ici, seuls les touristes prennent en stop et ils ne sont pas nombreux à passer, tant et si bien que j'attends 3 heures sous une tempête de sable. Agades est réputée pour cela. C'est exactement la tempête de neige chez nous mais on remplace les flocons par des grains de sable. Cela fait très mal en pleine face. Les voitures protègent quelquefois les phares en y collant un scotch épais sur le verre. Sinon avec le temps on obtient du verre brouillé. C'est bien pour la fenêtre des WC mais pas le top pour les phares.

Les tunisiens arrivent enfin et m'embarquent. N'ayant pas réussi à vendre leur voiture ils avaient décidé de laisser la moitié des véhicules au camping pour continuer avec seulement 5 voitures. Mais au dernier moment, ils font la rencontre de 8 norvégiens qui cherchent une occasion pour Tahoua. Un compromis est trouvé avec eux, les norvégiens acceptent de payer l'essence et tous les véhicules prennent la route.

Grosses tensions dans le groupe de Tunisiens. C'est très difficile de circuler en convoi de 10 voitures surtout quand le groupe n'est pas soudé et que se greffent des difficultés financières. Certains sont soupçonnés de posséder encore de l'argent. C'est vraiment l'exemple à ne pas suivre. Ils sont 14 copains, tous originaires du même quartier à Tunis, tous célibataires, entre 25 et 35 ans, ayant de très bonnes professions, etc. Leur aventure est partie sur un coup de tête. Ils ont appris que les voitures se vendaient bien au Niger et que ceux qui les passaient gagnaient bien leur vie. Alors ils décident d'aller en Allemagne pour acheter de grosses voitures qui ne valent presque rien là bas et de les emmener au Niger. Pour eux le Sahara (dans leur tête) se traverse comme tous les autres pays. Ils pensaient même que la route était goudronnée d'Alger jusqu'au Niger. Quelle mauvaise surprise ! Encore heureux, ils avaient pris un guide à Tamanrasset pour traverser le Sahara. Mais l'un d'entre eux s'est perdu et il a fallu le rechercher. Ils sont partis pratiquement les mains dans les poches en disant à leur famille qu'ils seraient de retour dans 4 jours. Cela fait 13 jours qu'ils ont quitté le domicile et aucun d'eux n'a téléphoné au pays. Ils ont des véhicules (Mercedes) qui ne sont pas adaptés pour l'Afrique, donc difficiles à vendre – tout faux sur toute la ligne.

Ils veulent descendre le plus rapidement possible pour vendre leurs voitures. On roule de nuit, à 120-130 km à l'heure, avec en permanence des ânes qui traversent la route. Ce qui devait arriver arrive et la voiture dans laquelle je me trouve percute un âne. Bilan, il faut tracter la voiture de nuit jusqu'au village voisin. Le groupe de norvégiens et moi-même sommes conduit jusqu'à Tahoua et j'ai préféré ne pas savoir ce que ce groupe de tunisiens était devenu.

 

Tahoua – Niamey : 400 km en 10 h entassés à 20 dans un bus taxi-brousse, genre J7 ou transporter. Le bus ne part que lorsqu'il est complet - normal en Afrique. Pendant ce trajet, il y aura 3 arrêts pour la prière, un arrêt pour un pneu crevé et un pour la réparation, une quinzaine d'arrêts pour contrôles de la police. Pour ces derniers, la route est barrée et les policiers contrôlent les papiers avec la liste de tous les voyageurs. Je me sens dans un pays "fliqué".

A Niamey, la Capitale, j'arrive en soirée et je trouve un endroit pour dormir, un emplacement réservé aux voyageurs locaux. La plupart dorment par terre dans la cour et paient 200 CFA (4 francs français). Je dors dans une pièce réservée aux bagages où il y a un va-et-vient toute la nuit, mais je me sens plus en sécurité pour les bagages. Bien sûr, je dors par terre comme tout le monde mais j'y suis habitué depuis mon départ.

Les deux autres nuits passées à Niamey, je les passe dans un petit hôtel où j'ai la douche. On ne peut s'imaginer les bienfaits d'une douche après autant de temps passé entre le désert, les tempêtes de sable, les transports sur les pistes poussiéreuses, etc.

Mes deux derniers jours passés à la Capitale sont occupés à chercher une solution pour me rendre en Egypte. J'ai abandonné l'idée du voyage terrestre en passant par le Tchad et le Soudan. La guerre civile est toujours d'actualité et je serais obligé de traverser des régions très dangereuses.

J'opte pour l'avion, mais le parcours Niamey – Le Caire est loin d'être évident. Je dois passer par Djeddah en Arabie Saoudite et pour cela il me faut obtenir un visa de transit pour ce pays.

 

Avion Niamey – Le Caire : c'est la première fois que je peux lire pendant tout le voyage. Après une courte escale à N'djamena au Tchad, nous atterrissons à Djeddah. Ici, une escale de 10 heures. J'en profite pour tenter d'obtenir un visa de touriste – je sais que c'est extrêmement difficile, peu d'étrangers l'obtiennent, sauf les musulmans qui se rendent à la Mecque. Ou alors il faut un motif précis, qu'une personnalité locale désire votre visite et motive la demande pour vous. J'ai du temps… et j'ai en poche l'adresse d'un éleveur de pigeon à Djeddah même, qu'un éleveur français a fourni en pigeons reproducteurs. Je me dis que cette personne ou entreprise pourrait être intéressée par ma visite et dans ce cas, c'est elle qui se chargerait des démarches. Malheureusement le numéro de téléphone que j'ai a dû changer et les douaniers s'avèrent peu coopérants. J'essaie les renseignements mais il me manque le deuxième prénom de la personne. Des Mohamed …………. il y en a plus de 100. Je tente de contacter l'ami éleveur en France mais il est absent. Je me résigne à continuer mon chemin vers l'Egypte – dommage j'étais près du but.

L'aéroport de Djeddah est impressionnant, tout est neuf et surdimensionné par rapport au traffic. C'est un gros contraste en sortant de l'Afrique noire.